vendredi 29 mai 2015

Tiers payant, tabac, hôpital... : ce que contient la loi Santé


VALÉRIE MAZUIR / EDITRICE WEB | 

DOSSIER - Tour d’horizon des principales dispositions du projet de loi Santé, défendu par Marisol Touraine, qui met en ébullition une partie du monde médical
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Le projet de loi Santé, né d’une réflexion collective engagée en septembre 2013, s’article autour de trois axes : « renforcer la prévention, recentrer le système de santé sur les soins de proximité et créer de nouveaux droits pour les patients ». Il prévoit la généralisation du tiers payant, mesure phare et décriée, mais porte aussi sur la prévention de l’ivresse des jeunes et du tabagisme ou la définition du service public hospitalier.

Voté en avril à l’Assemblée nationale, le texte ne devrait être examiné au Sénat qu’en septembre.
Manuel Valls a annoncé l’organisation d’une « grande conférence de la santé », afin de poursuivre la « réflexion engagée » avec le projet de loi.
Tour d’horizon des principales dispositions du projet de loi défendu par Marisol Touraine.


Généraliser le tiers payant



La généralisation à tous les assurés, d’ici à 2017, de la dispense d’avance de frais lors d’une consultation cristallise les tensions avec les médecins, qui craignent les difficultés d’obtenir le remboursement par l’assurance-maladie et les complémentaires santé. Le texte ne mentionne pas de caractère obligatoire, ni de sanction pour les professionnels récalcitrants au dispositif, qui se mettra en place progressivement. Une garantie de paiement des médecins doit être inscrite dans la loi, avec notamment des pénalités à l’encontre de l’Assurance-maladie pour un délai de remboursement supérieur à 7 jours. Pour les professionnels, qui dénoncent les dysfonctionnement déjà à l’oeuvre, ce n’est pas suffisant.

Redéfinir le service public hospitalier

Le projet redéfinit la notion de service public hospitalier et les obligations pour assumer les missions de service public (urgences, enseignement, recherche, etc). Les établissements privés redoutent d’être évincés de ce nouveau service public et des fonds dédiés, notamment parce qu’ils ne devraient plus réaliser de dépassements d’honoraires pour y participer. La ministre a réaffirmé que les dépassements d’honoraires seraient interdits.


Une nouvelle organisation territoriale

Le « service territorial de santé au public », dans le projet de loi initial, est remplacé par des « communautés professionnelles territoriales de santé », visant pareillement à structurer les parcours de santé, notamment autour des patients atteints de maladies chroniques. La nouvelle formulation met en évidence « que l’organisation des parcours de santé partira des professionnels eux-mêmes au lieu d’être le seul fait des Agences régionales de santé » (ARS), dont les médecins craignaient la mainmise. 


Faire évoluer les compétences médicales

Les médecins redoutent un « démantèlement » de leur métier à travers la délégation de leurs tâches aux personnels paramédicaux. La possibilité offerte aux pharmaciens de pratiquer certaines vaccinations était ainsi inscrite dans le projet de loi santé. La ministre propose désormais que la mesure fasse d’abord l’objet « d’expérimentations » afin de « répondre aux inquiétudes » des médecins.
Le texte prévoit également la possibilité pour les infirmiers et sages-femmes de prescrire des substituts nicotiniques.
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De nouveaux droits pour les patients

Un dossier médical partagé. Le dossier médical sera relancé, dans le giron de l’assurance-maladie, pour favoriser la circulation des informations entre professionnels concernant un patient.
Des actions de groupe en santé. La loi permettra de regrouper dans une seule procédure les demandes de réparations concernant un grand nombre de patients victimes de dommages dus à leurs traitements.
Ouvrir l’accès aux données de santé. Le projet doit garantir pour la société civile un accès facilité mais encadré aux données de santé, comme celles de l’assurance-maladie.
Un tarif social va être mis en place pour les lunettes, prothèses auditives et soins dentaires en direction des bénéficiaires de l’aide à la complémentaires santé


Renforcer la lutte anti-tabac

Instaurer, mi-2016, un paquet de cigarettes « neutre », c’est-à-dire sans logo et standardisé, est la mesure-phare du plan anti-tabac du gouvernement. Des amendements sont aussi attendus comme l’interdiction de fumer en voiture en présence d’enfants de moins de 12 ans, les espaces de vente sans publicité ou l’interdiction des arômes artificiels.


Une meilleure information nutritionnelle

Le projet de loi prévoit la mise en place de « logos » de différentes couleurs sur les aliments industriels, selon leur qualité nutritionnelle, pour orienter les consommateurs et prévenir l’obésité. L’étiquetage nutritionnel prévu serait facultatif.
Les députés ont décidé pénaliser l’incitation à la maigreur - du côté des agences de mannequin -, tout en prohibant les fontaines à soda dans les entreprises et les lieux collectifs et en réprimant l’incitation à la consommation excessive d’alcool, fréquente lors des bizutages notamment.


A destination des jeunes

Un parcours éducatif en santé sera instauré de la maternelle au lycée. Les parents pourront choisir un médecin traitant, généraliste ou pédiatre, pour leur enfant de moins de 16 ans.
Pour prévenir l’ivresse des jeunes, l’incitation à une consommation excessive pourra être sanctionnée de 15.000 euros d’amende et un an d’emprisonnement, l’incitation à une consommation habituelle de 45.000 euros d’amende et deux ans de prison.


Expérimenter les « salles de shoot »

Les salles de consommation de drogue à moindre risque (SCMR), appelées « salles de shoot », seront expérimentées pendant six ans. Elles sont destinées aux toxicomanes précarisés, qui se droguent dans des conditions d’hygiène déplorables.


Un droit à l’oubli

Il n’y aura pas de majorations de tarifs ni d’exclusion de garanties pour les anciens malades du cancer souscrivant une assurance ou un emprunt.


La santé environnementale

Ce volet n’existait pas dans le projet initial ; il est le fruit du travail parlementaire. La notion d’«  exposome » a été introduite afin de prendre en compte le risque chimique lié à l’environnement. Par ailleurs le bisphénol A va être interdit dans les jouets, car il s’agit de perturbateurs endocriniens.
Dossier édité par Valérie Mazuir




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