Le programme ou « pacte » de stabilité
budgétaire qui fixe les objectifs de désendettement de la France doit
être présenté mercredi en conseil des ministres, puis débattu puis voté
le 29 avril à l'Assemblée nationale, avant d'être soumis à l'approbation
de Bruxelles. Les "recommandations" que la Commission européenne
formulera dans un délai d'environ un mois devront être théoriquement
prises en compte par le gouvernement dans l'élaboration du projet de loi
de finances 2015.
La France est tenue de remettre ses finances en ordre, alors que la Commission européenne, qui achève son mandat dans quelques semaines, l'a placée début mars sous "surveillance renforcée", comme l'Espagne et l'Irlande, en raison de son manque de compétitivité et de sa dette trop élevée.
Mais le gouvernement compte sur la nouvelle donne -remaniement, détails sur le plan de 50 milliards d'économies et présentation du pacte de responsabilité censé relancer la croissance- pour gagner la confiance de ses partenaires européens.
Ceux-ci avaient assez mal réagi lorsque le Président Hollande, puis le ministre des Finances Michel Sapin avaient laissé entendre que la France pourrait ralentir le rythme de réduction de son déficit afin de préserver une croissance tout juste renaissante - autour de 1% attendu en 2014.
Au point que M. Sapin avait assuré quelques jours plus tard que la France n'avait pas demandé de nouveau délai pour ramener son déficit public (Etat, protection sociale et collectivités locales) sous l'équivalent de 3% de son produit intérieur brut et s'engageait formellement à respecter cet objectif, comme promis, à fin 2015. Il a été en cela soutenu par le Fonds monétaire international qui, dans ses prévisions de printemps publiées le 9 avril, estime que la France peut atteindre les 3% en 2015.
Mesures d'austérité
Comme un premier gage, le Premier ministre Manuel Valls a déjà annoncé mercredi le plan de 50 milliards d'économies dans la dépense publique d'ici 2017, présenté comme une garantie du "sérieux budgétaire" de la France. Il a également établi le 8 avril le cadre du pacte de responsabilité, un allègement de 30 milliards d'euros des cotisations patronales, en échange d'investissements et d'embauches. Reste désormais à connaître le rythme de la réduction des déficits, pour passer de 4,3% du PIB en 2013 à moins de 3% fin 2015. Il est possible et même probable que l'objectif initial présenté, un retour à 2,8% du PIB l'an prochain, soit légèrement révisé à la hausse.
Le gouvernement affronte de fait une fronde au sein de son propre camp. Le choix assumé d'une politique de l'offre et le détail des coupes, gels et restructurations, n'ont pas convaincu, voire inquiètent. Malgré les effort de Manuel Valls pour affirmer que ces mesures d'austérité ne visaient pas seulement à satisfaire l'Europe mais aussi à relancer la compétitivité de la France et, dans une moindre mesure, à agir en faveur du pouvoir d'achat des plus modestes. Un pacte de solidarité, représentant 5 milliards d'euros de baisses d'impôts et de charges salariales pour les ménages les plus modestes a été annoncé par François Hollande en réaction à la défaite du PS aux Municipales. Mais cette nouveauté, censée contrebalancer les effets du pacte de responsabilité financé par des économies et la désindexation de certaines prestations sociales, ne suffit pas aux yeux des députés les plus à gauche.
Le problème est de faire tout cela sans remettre en cause l'objectif du retour du déficit sous les 3% en 2015. En posant l'équation brute des économies réalisées (50 milliards), du pacte de responsabilité à financer (30 milliards), des baisses d'impôts sur les entreprises (environ 7 milliards), des aides pour les ménages (5 milliards) et de la réduction du déficit (évaluée selon les économistes autour d'au moins 30 milliards): le compte purement arithmétique ne semble pas y être.
Un calcul contesté à Matignon, où l'on affirme que 50 milliards d'économies d'ici 2017, "ça suffit". "Le gouvernement peut arriver à 3% mais à la condition que la croissance de la dépense publique soit celle promise par le gouvernement", soit, entre 0,1 et 0,2% par an quand elle était de 1% par an depuis la crise, assure Eric Heyer, économiste à l'Observatoire français des conjoncture économiques. Mais, prévient-il, "ce sera au prix du chômage qui augmente et d'une activité qui reste molle".
C'est justement pour cela que tous les députés socialistes ne sont pas convaincus du bien-fondé de la priorité mise sur la réduction des déficits. De plus, vendredi, Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d'Europe-Ecologie-Les-Verts a annoncé que son parti ne voterait pas le plan d'économies, qui prévoit notamment un gel des prestations sociales (pensions de retraite, logement, famille) jusqu'en 2015, ainsi qu'un nouveau gel du point d'indice des fonctionnaires jusqu'en 2017.
La veille, une douzaine de députés PS ont demandé dans une lettre à Manuel Valls de limiter les économies à 35 milliards d'euros, craignant sinon "reculs sociaux et mise à mal des services publics".
______________________
Encadré
Les principales composantes du programme de stabilité
Le programme de stabilité pour 2015-17 est un texte qui fixe les objectifs gouvernementaux de désendettement et la trajectoire des finances publiques (recettes, dépenses), et inclut les mesures prises pour améliorer la compétitivité du pays.
Le scénario macro-économique
Jusqu'ici le gouvernement a conservé sa prévision, modeste, d'une croissance de 0,9% du produit intérieur brut pour 2014, puis 1,7% en 2015. Mais plus d'une fois l'exécutif a laissé entendre que cette année, le rythme serait plutôt de 1%, voire un peu plus.
Dans l'immédiat, l'Insee prévoit une très légère reprise au premier semestre (+0,1% jusqu'en mars et +0,3% entre avril et juin). Si ces prévisions de croissance se confirment et si les deux derniers trimestres connaissent chacun une progression égale à celle du 2e, la croissance sera de 0,7% sur l'année, selon l'Institut. Mais globalement, les conjoncturistes s'attendent à un meilleur deuxième semestre.
Dans ce cadre, la France a promis de ramener son déficit public sous l'équivalent de 3% de son PIB en 2015, avec une étape intermédiaire à 3,6% en 2014. Mais la marche s'annonce en réalité plus haute que prévu, puisqu'en 2013, le déficit a atteint 4,3% du PIB, un niveau inférieur à celui de 2012 (4,8%) mais pas autant que souhaité (4,1%).
La France, qui détient un double record du poids des prélèvements obligatoires et de celui des dépenses publiques dans la richesse nationale parmi les grands pays développés, pourrait voir les deux se stabiliser. Le gouvernement a en effet promis que plus aucun effort fiscal ne serait demandé aux Français après 2014 et s'est également engagé à ralentir de 50 milliards d'euros en trois ans la progression naturelle de la dépense.
Les coupes dans la dépense publique
Le Premier ministre Manuel Valls a annoncé mercredi que 50 milliards seraient économisés d'ici 2017 dans la dépense publique, dont 18 milliards sur l'Etat, 11 milliards sur la protection sociale, 10 milliards sur les collectivités territoriales et autant sur l'assurance-maladie.
Parmi les coupes les plus douloureuses, il a annoncé la non-revalorisation au rythme de l'inflation jusqu'en 2015 des prestations sociales (pensions de retraite, logement, famille), hors minima sociaux. Les fonctionnaires continueront également jusqu'à la fin du quinquennat à ne connaître aucune augmentation naturelle (en fonction de l'inflation) de leurs salaires.
Plus généralement, les ministères et les opérateurs de l'Etat seront mis à la diète, les collectivités territoriales seront réformées, avec des mutualisations et, à terme, la disparition des départements, la branche famille devra encore trouver 800 millions d'économies et les partenaires sociaux se mettre d'accord sur une nouvelle convention d'assurance-chômage pour économiser 2 milliards d'euros à horizon 2017.
Côté santé, le recours aux génériques sera valorisé, ainsi que la baisse du prix des médicaments en général. La chirurgie ambulatoire -qui consiste à ne pas faire dormir le patient à l'hôpital- sera développée, le suivi des personnes âgées amélioré, ainsi que les soins de premier recours.
Le Pacte pour restimuler la croissance
Allègement de cotisations patronales d'une ampleur jamais égalée, accompagné d'un coup de pouces aux ménages modestes; le Pacte de responsabilité et de solidarité voulu par François Hollande doit aider les entreprises à relancer investissements et embauches.
Les 30 milliards d'aides se répartiront entre les 20 milliards déjà dévolus au crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), qui cible dès cette année les salaires jusqu'à 2,5 Smic. Le reste sera réparti entre les bas salaires et au contraire les salaires plus élevés (jusqu'à 3,5 fois le Smic), ainsi que, pour un milliard, aux travailleurs indépendants non concernés par le CICE.
Le gouvernement met tous ses espoirs dans ce pacte, puisque les entreprises doivent s'engager en terme de créations et de qualité de l'emploi. Mais de nombreux économistes craignent que cet argent, s'il donne de l'air aux entreprises, ne suffise qu'à restaurer des taux de marges tombés après la crise à des niveaux jamais connus, et non à embaucher à court terme.
Le 5 mars, le patronat et deux syndicats (CFDT-CFTC) se sont mis d'accord sur une négociation des "contreparties" par branches.
Parallèlement à ces aides aux entreprises, le gouvernement s'est également engagé à donner un coup de pouce aux ménages les plus modestes, à hauteur de 5 milliards d'euros, dont 500 millions d'euros pour baisser la fiscalité des foyers les plus modestes.
La France est tenue de remettre ses finances en ordre, alors que la Commission européenne, qui achève son mandat dans quelques semaines, l'a placée début mars sous "surveillance renforcée", comme l'Espagne et l'Irlande, en raison de son manque de compétitivité et de sa dette trop élevée.
Mais le gouvernement compte sur la nouvelle donne -remaniement, détails sur le plan de 50 milliards d'économies et présentation du pacte de responsabilité censé relancer la croissance- pour gagner la confiance de ses partenaires européens.
Ceux-ci avaient assez mal réagi lorsque le Président Hollande, puis le ministre des Finances Michel Sapin avaient laissé entendre que la France pourrait ralentir le rythme de réduction de son déficit afin de préserver une croissance tout juste renaissante - autour de 1% attendu en 2014.
Au point que M. Sapin avait assuré quelques jours plus tard que la France n'avait pas demandé de nouveau délai pour ramener son déficit public (Etat, protection sociale et collectivités locales) sous l'équivalent de 3% de son produit intérieur brut et s'engageait formellement à respecter cet objectif, comme promis, à fin 2015. Il a été en cela soutenu par le Fonds monétaire international qui, dans ses prévisions de printemps publiées le 9 avril, estime que la France peut atteindre les 3% en 2015.
Mesures d'austérité
Comme un premier gage, le Premier ministre Manuel Valls a déjà annoncé mercredi le plan de 50 milliards d'économies dans la dépense publique d'ici 2017, présenté comme une garantie du "sérieux budgétaire" de la France. Il a également établi le 8 avril le cadre du pacte de responsabilité, un allègement de 30 milliards d'euros des cotisations patronales, en échange d'investissements et d'embauches. Reste désormais à connaître le rythme de la réduction des déficits, pour passer de 4,3% du PIB en 2013 à moins de 3% fin 2015. Il est possible et même probable que l'objectif initial présenté, un retour à 2,8% du PIB l'an prochain, soit légèrement révisé à la hausse.
Le gouvernement affronte de fait une fronde au sein de son propre camp. Le choix assumé d'une politique de l'offre et le détail des coupes, gels et restructurations, n'ont pas convaincu, voire inquiètent. Malgré les effort de Manuel Valls pour affirmer que ces mesures d'austérité ne visaient pas seulement à satisfaire l'Europe mais aussi à relancer la compétitivité de la France et, dans une moindre mesure, à agir en faveur du pouvoir d'achat des plus modestes. Un pacte de solidarité, représentant 5 milliards d'euros de baisses d'impôts et de charges salariales pour les ménages les plus modestes a été annoncé par François Hollande en réaction à la défaite du PS aux Municipales. Mais cette nouveauté, censée contrebalancer les effets du pacte de responsabilité financé par des économies et la désindexation de certaines prestations sociales, ne suffit pas aux yeux des députés les plus à gauche.
Le problème est de faire tout cela sans remettre en cause l'objectif du retour du déficit sous les 3% en 2015. En posant l'équation brute des économies réalisées (50 milliards), du pacte de responsabilité à financer (30 milliards), des baisses d'impôts sur les entreprises (environ 7 milliards), des aides pour les ménages (5 milliards) et de la réduction du déficit (évaluée selon les économistes autour d'au moins 30 milliards): le compte purement arithmétique ne semble pas y être.
Un calcul contesté à Matignon, où l'on affirme que 50 milliards d'économies d'ici 2017, "ça suffit". "Le gouvernement peut arriver à 3% mais à la condition que la croissance de la dépense publique soit celle promise par le gouvernement", soit, entre 0,1 et 0,2% par an quand elle était de 1% par an depuis la crise, assure Eric Heyer, économiste à l'Observatoire français des conjoncture économiques. Mais, prévient-il, "ce sera au prix du chômage qui augmente et d'une activité qui reste molle".
C'est justement pour cela que tous les députés socialistes ne sont pas convaincus du bien-fondé de la priorité mise sur la réduction des déficits. De plus, vendredi, Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d'Europe-Ecologie-Les-Verts a annoncé que son parti ne voterait pas le plan d'économies, qui prévoit notamment un gel des prestations sociales (pensions de retraite, logement, famille) jusqu'en 2015, ainsi qu'un nouveau gel du point d'indice des fonctionnaires jusqu'en 2017.
La veille, une douzaine de députés PS ont demandé dans une lettre à Manuel Valls de limiter les économies à 35 milliards d'euros, craignant sinon "reculs sociaux et mise à mal des services publics".
______________________
Encadré
Les principales composantes du programme de stabilité
Le programme de stabilité pour 2015-17 est un texte qui fixe les objectifs gouvernementaux de désendettement et la trajectoire des finances publiques (recettes, dépenses), et inclut les mesures prises pour améliorer la compétitivité du pays.
Le scénario macro-économique
Jusqu'ici le gouvernement a conservé sa prévision, modeste, d'une croissance de 0,9% du produit intérieur brut pour 2014, puis 1,7% en 2015. Mais plus d'une fois l'exécutif a laissé entendre que cette année, le rythme serait plutôt de 1%, voire un peu plus.
Dans l'immédiat, l'Insee prévoit une très légère reprise au premier semestre (+0,1% jusqu'en mars et +0,3% entre avril et juin). Si ces prévisions de croissance se confirment et si les deux derniers trimestres connaissent chacun une progression égale à celle du 2e, la croissance sera de 0,7% sur l'année, selon l'Institut. Mais globalement, les conjoncturistes s'attendent à un meilleur deuxième semestre.
Dans ce cadre, la France a promis de ramener son déficit public sous l'équivalent de 3% de son PIB en 2015, avec une étape intermédiaire à 3,6% en 2014. Mais la marche s'annonce en réalité plus haute que prévu, puisqu'en 2013, le déficit a atteint 4,3% du PIB, un niveau inférieur à celui de 2012 (4,8%) mais pas autant que souhaité (4,1%).
La France, qui détient un double record du poids des prélèvements obligatoires et de celui des dépenses publiques dans la richesse nationale parmi les grands pays développés, pourrait voir les deux se stabiliser. Le gouvernement a en effet promis que plus aucun effort fiscal ne serait demandé aux Français après 2014 et s'est également engagé à ralentir de 50 milliards d'euros en trois ans la progression naturelle de la dépense.
Les coupes dans la dépense publique
Le Premier ministre Manuel Valls a annoncé mercredi que 50 milliards seraient économisés d'ici 2017 dans la dépense publique, dont 18 milliards sur l'Etat, 11 milliards sur la protection sociale, 10 milliards sur les collectivités territoriales et autant sur l'assurance-maladie.
Parmi les coupes les plus douloureuses, il a annoncé la non-revalorisation au rythme de l'inflation jusqu'en 2015 des prestations sociales (pensions de retraite, logement, famille), hors minima sociaux. Les fonctionnaires continueront également jusqu'à la fin du quinquennat à ne connaître aucune augmentation naturelle (en fonction de l'inflation) de leurs salaires.
Plus généralement, les ministères et les opérateurs de l'Etat seront mis à la diète, les collectivités territoriales seront réformées, avec des mutualisations et, à terme, la disparition des départements, la branche famille devra encore trouver 800 millions d'économies et les partenaires sociaux se mettre d'accord sur une nouvelle convention d'assurance-chômage pour économiser 2 milliards d'euros à horizon 2017.
Côté santé, le recours aux génériques sera valorisé, ainsi que la baisse du prix des médicaments en général. La chirurgie ambulatoire -qui consiste à ne pas faire dormir le patient à l'hôpital- sera développée, le suivi des personnes âgées amélioré, ainsi que les soins de premier recours.
Le Pacte pour restimuler la croissance
Allègement de cotisations patronales d'une ampleur jamais égalée, accompagné d'un coup de pouces aux ménages modestes; le Pacte de responsabilité et de solidarité voulu par François Hollande doit aider les entreprises à relancer investissements et embauches.
Les 30 milliards d'aides se répartiront entre les 20 milliards déjà dévolus au crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), qui cible dès cette année les salaires jusqu'à 2,5 Smic. Le reste sera réparti entre les bas salaires et au contraire les salaires plus élevés (jusqu'à 3,5 fois le Smic), ainsi que, pour un milliard, aux travailleurs indépendants non concernés par le CICE.
Le gouvernement met tous ses espoirs dans ce pacte, puisque les entreprises doivent s'engager en terme de créations et de qualité de l'emploi. Mais de nombreux économistes craignent que cet argent, s'il donne de l'air aux entreprises, ne suffise qu'à restaurer des taux de marges tombés après la crise à des niveaux jamais connus, et non à embaucher à court terme.
Le 5 mars, le patronat et deux syndicats (CFDT-CFTC) se sont mis d'accord sur une négociation des "contreparties" par branches.
Parallèlement à ces aides aux entreprises, le gouvernement s'est également engagé à donner un coup de pouce aux ménages les plus modestes, à hauteur de 5 milliards d'euros, dont 500 millions d'euros pour baisser la fiscalité des foyers les plus modestes.
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