lundi 21 avril 2014

La potion très amère du Medef pour réaliser des économies sur le système de santé



Dans sa participation au débat sur la stratégie nationale de santé, le Medef propose d'économiser jusqu'à 30 milliards d'euros, via notamment une baisse des soins pris en charge par l'assurance maladie et une montée en puissance des complémentaires santé.

Économiser entre 25 et 30 milliards d'euros sur les dépenses maladie à l'horizon 2017 ! C'est ce que propose le Medef dans un document qui se veut sa contribution au « débat sur la stratégie nationale de santé ». Pour l'organisation patronale, la France n'a plus « le meilleur système au monde » ainsi que l'avait qualifié en 2000 l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Un système qui aurait vieilli et qui serait « mal préparé aux révolutions en cours »… qui conduit à une « dégradation lente mais inévitable » et qui apparait de plus en plus  «comme un coût pour la collectivité ».
Pour remédier à ces maux. Le Medef propose d'abord à « moyen terme une architecture-cible de financement favorisant l'efficience du système et compatible avec la compétitivité ».

Beaucoup moins de remboursements par l'Assurance maladie...

Très concrètement, il s'agirait de transférer une bonne partie de la couverture santé de l'assurance maladie vers les complémentaires et les sur-complémentaires santé… Une vielle antienne patronale.
Dans un scénario dit « réaliste », Le Medef propose de baser l'organisation du système de santé sur trois piliers: assurance maladie, complémentaires et assurés, via des sur-complémentaires facultatives. 

... au profit des complémentaires santé

Le premier pilier comprendrait un "panier de soins", c'est-à-dire l'ensemble des produits de santé et des actes curatifs ou préventifs remboursés par la Sécu. Le Medef propose de "fortement le réduire" et de le "recentrer" sur les soins et services "essentiels", ce qui représenterait 10 milliards d'économie. Le deuxième pilier serait un socle obligatoire pour les seuls salariés du privé au niveau d'un panier de soins défini par un accord national interprofessionnel (ANI). C'est sur ce deuxième pilier que les complémentaire santé seraient compétentes. Le reste de la couverture santé serait à la charge des assurés qui pourraient se tourner vers des "sur-complémentaires" s'ils le souhaitent.
La mise en œuvre de ce scénario "se traduirait par une diminution des dépenses d'assurance maladie obligatoire de l'ordre de 15 à 20 milliards d'euros d'ici 2017". Surtout, pour le Medef, ce schéma aurait le mérite de conduire à une baisse des cotisations maladies (acquittées jusqu'à présent à hauteur de 12,80% par les entreprises et 0,75% par les salariés). En revanche, pour les salariés, ce système se traduira automatiquement par une revalorisation du coût des complémentaires santé (individuelles comme de groupe)...

 Relancer le ticket modérateur

Mais le Medef ne s'arrête pas là. Il espère encore environ 15 milliards de dépenses économisées via « 5 axes prioritaires ». Par exemple, il s'agirait de rééquilibrer l'offre de soins, entre la ville et l'hôpital, via un développement de l'hôpital de jour (7 à 8 milliards d'économies). Il conviendrait aussi de développer une véritable "médecine de parcours " pour relever le défi de la montée en charge des maladies chroniques et du vieillissement (2 milliards d'euros). Autre axe, selon le Medef, il faut "davantage responsabiliser l'ensemble des acteurs du système de santé": professionnels de santé, organismes gestionnaires et patients… via l'instauration d'un « ticket modérateur d'ordre public »par acte et/ou par parcours de soins qui ne serait remboursé ni par l'assurance maladie ni par les organismes complémentaires (3 milliards d'euros environ économisés par an).
La potion patronale risque d'avoir du mal à passer.

Jean-Christophe Chanut

1 commentaire:

  1. Alain de Malglaive22 avril 2014 à 05:56

    Historiquement dans un système d'offre et demande, la mise en place d'un plancher a toujours eu pour effet de définir un point de convergence sur lequel les différents acteurs se positionnent et finissent par s'aligner. Si l'on prend par exemple le SMIC, il constitue un plancher mais surtout une base de calcul marketing incontournable pour la plupart des produits.
    C'est ce qui nous attend avec l'ANI: à terme l'offre optique et dentaire pourrait s'aligner budgétairement sur la capacité moyenne de remboursement des contrats dessinés par des accords.
    Cette standardisation s'appliquera encore plus rapidement sur les formules de remboursement et de tarification.
    La sur-complémentaire devra chercher son créneau, rien ne dit qu'elle le trouvera.
    Déjà aujourd'hui les conjoints perdent leur droit sur les couvertures obligatoires s'ils sont supposés être couvert par ailleurs: la standardisation du RC a commencé!

    RépondreSupprimer