Ils sortent de Normale, Polytechnique ou HEC. On les
retrouve chez Apple, Facebook, Google et dans les start-up qui inventent
les technologies du futur.
Essayer, oui, mais avec un projet réfléchi. «Mon objectif était de venir ici pour comprendre l’innovation qui affecte aussi bien mon métier que l’économie en général. J’ai ensuite examiné les options pour m’y immerger», confie Soline Ledésert (ENS Cachan, Essec), analyste en VIE chez Orange Silicon Valley.
Ingénieur en biotechnologies, Simon Charles a aussi choisi sa destination avec soin. «J’avais repéré plusieurs entreprises, dans plusieurs pays qui sont en avance dans mon domaine.» Il a rejoint Arbor Vita, une start-up de Fremont, qui avait déjà pris d’autres stagiaires de son école, l’ENSTBB. Cela aurait pu être ailleurs: «Beaucoup de ma promo sont partis à l’étranger, car l’emploi est encore peu développé en France dans notre secteur», explique-t-il. «Les profils français sont appréciés et les Américains reconnaissent de plus en plus la qualité de l’éducation française, confirme Reza Malekzadeh. Généralement après l’arrivée d’un premier Français, on remarque que la société va chercher plus de profils français si elle a besoin d’embaucher.»
Également en quête d’opportunités à la hauteur de son talent, Adrien Friggeri s’est tourné vers Facebook après un doctorat à l’INRIA/ENS Lyon. «Ma recherche se concentre sur les interactions sociales et leur impact sur les comportements humains. Ce travail repose sur la disponibilité d’un large volume de données. Aucune entreprise en France ne fait ce genre de recherche à une échelle aussi grande que Facebook», explique-t-il. «Je suis allé là où ça me semblait être le plus intéressant - en termes de travail et de moyens pour l’effectuer - et il se trouve que cet endroit est dans la Silicon Valley.» Mieux, Mark Zuckerberg en personne a demandé à ses équipes de faire une offre au jeune chercheur en socio-informatique après avoir vu son travail.
Plus qu’un poste, c’est une autre façon de travailler qui séduit les jeunes Français. «La Silicon Valley est attractive en raison de l’idéalisme des gens qui travaillent ici. Les employés croient à la mission de leur entreprise, et l’entreprise le leur rend bien. Le pouvoir de décision est plus accessible aux niveaux inférieurs de management ; il est possible d’avoir un impact», observe Charles, un normalien recruté par un géant du Web. Car ce qui compte, c’est de faire. Dans les entretiens d’embauche, on demande aux ingénieurs d’écrire un programme ou de résoudre une équation, pas leur diplôme. Une méthode qui a déjà désarçonné plus d’un polytechnicien, raconte Axel Guyon, actuel président de l’association des étudiants français de Stanford.
Pour Marc Maniez, cette approche a été salutaire. Premier employé français de Twitter, il a rejoint le site en 2009. «Mes études ne me rassuraient pas sur mon avenir en France. Chez Twitter, j’ai commencé avec un stage à mi-temps. J’ai fini par ouvrir le bureau du groupe en France», raconte-t-il. Pour lui, venir à San Francisco fut «libérateur». «J’ai pu m’épanouir professionnellement et j’ai beaucoup de gratitude pour cet environnement.»
Reconnaissants les opportunités qu’offre cet Eldorado, ces têtes bien faites envisagent de retourner en France… un jour. «Mon expatriation s’est faite par défaut, non par choix», confie Charles. «Mon rêve est de rentrer. Ce serait toutefois synonyme de nombreux sacrifices… Mais j’espère pouvoir acquérir suffisamment d’expérience pour pouvoir revenir en France avec un facteur différenciant.» Pour Axel Guyon, le facteur économique est aussi à prendre en considération. «Je ne pense pas rester définitivement, mais dans un premier temps, oui, car c’est plus facile pour finir de rembourser mon prêt étudiant et établir des contacts. Venant d’écoles d’ingénieur françaises, il n’y a pas d’intérêt à revenir tout de suite, il n’y a pas de plus-value sur le premier emploi. Je veux d’abord rentabiliser mon investissement.» Un investissement économique et humain.
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