C'est « le premier bijou qui mesure l'exposition au soleil » : le bracelet June, récompensé au salon mondial de l'électronique grand public (CES) de Las Vegas en janvier, dernier produit en date de la startup spécialiste des objets connectés Netatmo, arrive sur le marché. Ce petit galet à facettes, designé par Camille Toupet - qui a travaillé entre autres pour les joailliers Dinh Van et Boucheron - se portant sur un bracelet en cuir noir ou en broche, sera vendu 95 euros, en ligne et dans les Apple Stores dans un premier temps. Equipé d'un capteur d'UV, il communique en Bluetooth avec l'iPhone de l'utilisatrice qui reçoit des conseils pour mieux se protéger du soleil en temps réel, sur l'indice de crème approprié en fonction du type de peau et de l'intensité des rayons du moment : l'appli peut envoyer des alertes en cas de risque de coup de soleil, calcule l'exposition quotidienne maximale et la dose d'ensoleillement reçue. Utile pour prévenir le vieillissement prématuré de la peau, voire les tumeurs cutanées. Gadget, diront certains.
« On attend beaucoup de ce produit, à la croisée de plusieurs mouvements que sont les objets connectés et la fusion de la mode et de la technologie. Nous pensons que le June va très bien se vendre. Ce n'est pas un produit de niche : se protéger du soleil, c'est beaucoup plus grand public que de compter ses pas, que de porter un podomètre ! C'est un produit qui peut potentiellement s'écouler en millions d'unités, peut-être pas cet été mais à terme » confie à la Tribune Fred Potter, le fondateur et directeur général de Netatmo.
Un marché trop encombré des bracelets moniteurs d'activités
La startup, qui a connu le succès avec sa station météo connectée, n'a pas voulu aller sur le marché très encombré des bracelets moniteurs d'activité. « Il y a déjà beaucoup de bracelets connectés, trop. Il y a des effets d'écosystème. Avant de nous lancer dans un produit, nous nous demandons ce que l'on peut ajouter. Or c'est difficile de faire mieux que Fitbit ! » estime Fred Potter. Netatmo, qui emploie près de 50 personnes (70 d'ici la fin de l'année), à Boulogne-Billancourt pour l'essentiel au bureau commercial de Boston, se targue de concevoir des produits « élégants et intelligents. » Le public visé avec June est clairement féminin, mais une version pour homme n'est pas exclue. Le bracelet est « un produit destiné essentiellement à l'export. En France, la prise de conscience sur la nécessité de se protéger du soleil est plus faible que dans les pays nordiques, germaniques ou asiatiques, en Chine, au Japon. »Déjà rentable en exploitation
Même philosophie pour le précédent produit lancé par Netatmo, un thermostat connecté au design signé Philippe Starck : la startup française ne l'a pas lancé aux Etats-Unis en concurrence frontale avec Nest, la société de Tony Fadell rachetée à prix d'or en janvier par Google, mais a produit un appareil adapté aux normes européennes, avec lesquelles son rival américain n'est pas compatible. Sorti en novembre, le thermostat (179 euros) « se vend très bien », assure Fred Potter, sans dévoiler les volumes. « Les opérateurs professionnels, les plombiers, commencent à le proposer aux particuliers » qui peuvent aussi l'acheter en direct. Mais il reste lucide, face à la valorisation obtenue par Nest :« La France ce n'est pas les Etats-Unis. Ici, c'est la deuxième division. On sait qu'on n'atteindra pas 3,2 milliards de dollars ! » observe le directeur général de Netatmo.La startup avait levé 4,5 millions d'euros l'été dernier auprès d'Iris Capital, du fonds public FSN PME (géré par Bpifrance) et de Pascal Cagni, l'ancien patron d'Apple Europe. Si le métier des objets électroniques nécessite beaucoup de cash, la société fondée en 2011 n'a pas prévu de nouveau tour de table à court terme : « nous avons une exploitation profitable depuis 2013. Nous pouvons nous financer par des prêts bancaires » explique Fred Potter. Pas de projet d'entrée en Bourse pour l'instant, même si l'introduction d'Awox a montré qu'il y a « de l'intérêt chez les investisseurs pour l'univers des objets connectés ».
La promesse du Big data
Le produit phare reste la station météo personnelle (169 euros), pilotable depuis son smartphone ou sa tablette, distribuée dans plus de 160 pays, et complétée d'accessoires : « nous allons sortir un anémomètre (qui mesure le vent) et notre pluviomètre (69 euros) a rencontré un succès extraordinaire, nous avons été dévalisés ! » confie Fred Potter. Le produit intéresse les jardiniers amateurs mais aussi les professionnels du monde agricole. La station météo elle-même a séduit des clients très variés, du Commissariat à l'énergie atomique, qui en a commandé 60, au palais présidentiel de Mongolie ! Plus de 2.000 professionnels ont développé leurs propres applications « métiers » intégrant les données de leurs appareils : « c'est tout le bénéfice de la politique d'open data » relève le directeur général de Netatmo. A Paris, la communauté d'utilisateurs qui ont accepté de partager leurs données (température, humidité, pression) se chiffre en plusieurs centaines.Depuis décembre, Netatmo rend publiques toutes les données des utilisateurs (sauf ceux ayant refusé par opt-out), à travers une carte interactive mondiale. Des partenariats sont en discussions avec de grandes sociétés de météo intéressées par l'utilisation de ces données pour affiner leurs prévisions, grâce à ces multiples relevés rue par rue. « C'est l'une des promesses du Big data. Notre objectif n'est pas de gagner de l'argent avec ces données. Mais produire ces données a un coût, il faut donc que cela génère un certain revenu en face » relève Fred Potter. Pour l'utilisateur, c'est aussi la perspective de « meilleures prévisions, personnalisées, qui renforcent l'avantage produit. »
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