vendredi 6 juin 2014

Le principe d’innovation, bientôt inscrit, lui aussi, dans la constitution?

Cette idée fait son chemin pour contrer, selon ses partisans, les obstacles posés par le principe de précaution inscrit, lui, dans la Constitution. L'initiative, soutenue par de nombreux parlementaires, pourrait relancer les recherches scientifiques sur les OGM, le gaz de schiste entre autres sujets sensibles.
Souhaitée par certains lobbies, la remise en cause du principe de précaution n'est plus d'actualité. Inscrit dans la Constitution, il est pour l'instant immuable. En revanche, pour compenser les effets jugés pervers par certains découlant de son strict respect, un principe d'innovation, qui serait à son tour inscrit dans la constitution pourrait venir le compléter. C'est le souhait émis en 2010 par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) mais aussi par la Commission Lauvergeon cet automne.

Les Parlementaires prennent position

Cette initiative reçoit désormais le soutien d'un certain nombre de parlementaires, dont Claude Bartolone, le président de l'Assemblée nationale." Rien n'est dommageable que l'absence de débat. Or, le principe de précaution ne risque-t-il pas d'entraver l'innovation ? N'est-il pas trop utilisé ? L'innovation n'est-elle pas le meilleur moyen de préserver notre modèle social, de garantir le bien-être des Français ? Dans la conjoncture actuelle, les citoyens ont un fort désir de sécurité, de réassurance. Il faut bien évidemment en tenir compte. Mais il ne faut pas confondre précaution et abstention. Je m'attriste de voir la France reculer dans les classements des pays les plus innovants réalisés par l'Union européenne ou l'OCDE, de constater que notre pays est devenu au fil des années un pays suiveur ", a-t-il déclaré jeudi en introduction de l'audition publique sur le principe d'innovation organisée l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).

Eclairer les décisions

Créée en 1983, cette structure qui réunit 18 députés et 18 sénateurs a pour mission d'informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique afin, notamment " d'éclairer ses décisions ". A cet effet, l'OPCEST " recueille des informations, met en œuvre des programmes d'études et procède à des évaluations ". Et que propose l'OPCSET sur le principe d'innovation ? Le sénateur Bruno Sido, son président est bien clair, il faut aller de l'avant sur ce sujet. Mais des préalables sont requis. " L'innovation ne se décrète pas. Elle ne se résume pas à des querelles de mots, ne s'institutionnalise pas. Son essor dépend d'un changement culturel. Les mentalités doivent changer si l'on veut, grâce à l'innovation, faire avancer la société ".
 Jean-Yves Le Déaut, député et premier vice-président de l'OPCEST est sur la même longueur d'ondes. " Le principe de précaution est une bonne chose mais il est trop durement appliqué. Peut-être faut-il créer un nouvel environnement fiscal, juridique, règlementaire, normatif pour favoriser enfin l'innovation dans notre pays ? "
Concrètement, que propose l'Office ? Ce principe devra définir " un cadre général de l'innovation en France, de l'action des pouvoirs publics et du développement des entreprises innovantes des Français. Il doit être à la fois protecteur pour les innovateurs qui ne doivent pas être étouffés et pour la société qui doit savoir prendre en charge les risques inhérents au changement ".

"Ce qui écrit vaut souvent mieux que l'usage" 

Doit-il être inscrit dans la constitution ? L'OPCEST y est favorable. " Puisque la précaution a été sanctuarisée - avec un texte d'une grande sagesse -, il nous paraît indispensable que l'innovation le soit aussi. A la règle écrite de précaution, il faut ajouter une règle écrite d'innovation. De plus, dans notre pays où la Loi a progressivement effacé la coutume, notamment après la révolution, il ne faut pas sous-estimer l'importance de l'écrit. Pour nous Français, ce qui est établi sur des raisonnements, des analyses et des textes vaut souvent mieux que l'usage ", explique l'Office.
S'il ce principe devenait réalité, les recherches scientifiques portant sur certains sujets sensibles, aujourd'hui suspendues ou limitées en raison de l'application du principe de précaution, pourraient-elles reprendre ? Citons notamment les OGM, le gaz de schiste, la bioéthique, l'enfouissement des déchets nucléaires ou encore les ondes électromagnétiques.
Là encore, la réponse de l'OPCEST est sans ambigüité. « Entre le progrès tyrannique et la stagnation écologique, beaucoup estiment qu'il existe un chemin pour un progrès choisi en fonction des besoins et des ambitions de la société ». C'est notamment le cas d'Arnaud Montebourg, le ministre de l'Economie et du Redressement productif qui s'est déclaré à plusieurs reprises pour la reprise des recherches scientifiques sur le gaz de schiste.
L'auteur
Fabien Piliu
Fabien Piliu

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